Le programme de recherche
La Lucanie est une région antique du sud de l’Italie, qui recoupe aujourd’hui la Basilicate, le sud de la Campanie et le nord de la Calabre, traversant ainsi la péninsule italienne de part en part et joignant la côte tyrrhénienne à la mer ionienne. Elle doit son nom à un peuple, les Lucaniens, qui y développèrent une civilisation originale entre le Ve et le IIIe siècle avant J.-C., avant que la région ne soit conquise par les Romains. Bien avant, elle avait vu l’arrivée des Grecs qui, dès le VIIIe siècle avant J.-C., ont fondé sur ses côtes de puissants établissements. Ceux-ci entretenaient des relations avec les populations indigènes de l’intérieur, dont la vie quotidienne en fut durablement changée. Les auteurs anciens ne livrent malheureusement que de rares informations sur cette région et ses habitants ; c’est donc vers l’archéologie qu’il faut se tourner pour en apprendre davantage. Peu explorée jusqu’à la seconde guerre mondiale, la Lucanie est une terre de conquête archéologique récente ; depuis une cinquantaine d’années, les fouilles se sont néanmoins multipliées et continuent, aujourd’hui encore, à renouveler constamment notre perception de cette région antique. Si les découvertes récentes sont conservées en Italie, de nombreuses antiquités de Lucanie sont en fait présentes dans les collections parisiennes : le Louvre, le Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de France et le Petit Palais conservent en effet une série d’objets rapportés de Lucanie par des voyageurs français ou achetés par de riches collectionneurs qui en ont fait don au XIXe siècle aux grands musées parisiens.
Notre recherche sur la Lucanie antique cherchera donc à tirer parti des découvertes récentes en matière d’archéologie, mais aussi à mettre en valeur le patrimoine lucanien de la Ville de Paris. D’un point de vue archéologique, il s’agit surtout de dresser le portrait des populations qui se sont succédée dans la région au fil des siècles et de mieux comprendre ainsi la culture matérielle résultant de l’interaction entre Grecs, indigènes et Lucaniens. Nous travaillerons pour cela à établir un répertoire topographique des fouilles archéologiques menées dans toute la Lucanie, afin d’obtenir une vision claire de l’état de la recherche. Ce répertoire sera mis en ligne sur Internet et associé à une cartographie détaillée des découvertes. Dans la caractérisation des faciès archéologiques, nous nous intéresserons plus particulièrement aux formes d’occupation du territoire, aux pratiques funéraires et cultuelles, ainsi qu’aux productions artisanales, ce qui nous permettra de définir les continuités et les ruptures qu’a connues la région entre le VIIe et le IIIe siècle avant J.-C. À cet égard, les antiquités conservées à Paris offriront la matière à une enquête sur la production artisanale et sur les formes architecturales lucaniennes. D’un point de vue patrimonial, nous nous attacherons à étudier les archives des voyageurs français en Lucanie au XIXe siècle, ainsi que la constitution des collections d’antiquités lucaniennes à Paris. L’étude de ces archives et le dépouillement des registres d’entrée des musées permettront d’éclairer le parcours de ces objets, mais aussi le contexte de découverte de certaines pièces et de retisser ainsi les liens avec le contexte archéologique. Ce travail aboutira à la création d’un inventaire des antiquités lucaniennes conservées à Paris, qui permettra de valoriser les collections parisiennes. À terme, une exposition sur ce sujet pourra être envisagée.